« Les joueurs nous ont donné mandat de maintenir notre position ! »

Posté le 13.10.2016 à 12h06

Réélus le samedi 8 octobre pour un sixième mandat consécutifs en qualité de coprésidents de l’Union Nationale des Footballeurs Professionnels, Philippe Piat et Sylvain Kastendeuch, forts du soutien des joueurs qui ne se dément pas et du mandat obtenu pour maintenir la position qui fut la leur lors de l’AG de la LFP, entendent bien que leur syndicat tienne son rang pour continuer à peser sur l’avenir du football professionnel en France. Entretien à deux voix et à l’unisson, publié sur le site News Tank Football

« Vous avez été réélus à l’unanimité, qu’est-ce que cela signifie pour vous ? »

CDD

Sylvain Kastendeuch : « C’est l’ensemble du Comité directeur qui a été élu à l’unanimité, pas seulement les deux présidents, et je pense, Philippe en conviendra, qu’il faut le souligner. Au moment de l’élection, la satisfaction est réelle, pourquoi s’en cacher ? Mais l’unanimité n’est pas une fin en soi, même si elle nous conforte pleinement dans nos choix et témoigne de la confiance que nous pouvons inspirer à nos adhérents. C’est un moteur pour les deux années à venir, pas une récompense au terme de notre précédent mandat. Dans le football, nous avons appris qu’il n’est jamais possible de se reposer sur ses lauriers, même fraîchement coupés. Cela n’a jamais été dans nos habitudes, de toutes les façons, et ce serait une erreur compte tenu des circonstances et de l’ambiance générale. Il n’est pas étonnant, à ce titre, que les joueurs, que nos délégués-clubs aient participé, plus nombreux qu’à l’ordinaire, à notre Assemblée générale. Près de 100 joueurs en activité, je n’avais jamais vu cela… »

Philippe Piat : « Même si nous étions trois fois plus nombreux, le 27 novembre 1972 à Versailles, lorsque les dirigeants voulaient remettre en cause le contrat à durée librement déterminé et qu’il avait fallu passer par la seule grève des footballeurs en France pour l’imposer définitivement, cette présence massive est rassurante et tord le cou à l’image des footballeurs que l’on aime à colporter, et qui, nous le savons pour les côtoyer au quotidien, ne repose sur rien de concret et fait de l’exception la règle. La solidarité n’est pas un vain mot dans notre profession, c’est une première chose. Les joueurs, tous les joueurs, s’intéressent aussi à leur métier, veulent préserver leurs conditions de travail, savent – puisque les frontières ont explosé et que beaucoup d’entre eux ont connu ou ont partagé avec d’anciens coéquipiers de mauvaises expériences à l’étranger – que le statut du footballeur, chez nous, n’a pas d’égal dans le monde, que notre charte est partout citée en exemple dès que l’on évoque les conventions collectives, que l’UNFP veille au respect des contrat, que les salaires sont versés… Je mettrais cette forte participation à notre AG, au-delà de l’actualité comme le soulignait fort justement Sylvain, en corrélation avec nos 94 pour cent d’adhésion, la saison passée. Dans un pays où la désertification syndicale est vécue comme une fatalité, les footballeurs, par leur volonté de s’unir et de défendre ensemble leurs droits, donnent le bon exemple et prouvent, une fois encore, que l’on se trompe sur eux. »

« Lorsque vous évoquez l’actualité, vous faites bien évidemment référence aux problèmes, qui, depuis un an et demi maintenant, opposent les dirigeants, et qui ont leur paroxysme, le mercredi 5 octobre, avec le report de l’Assemblée générale de la LFP et donc de l’élection de son Conseil d’administration ?« 

PPP

Philippe Piat : « Depuis de longues années, j’ai vécu de drôles de situations, vous pouvez me croire, mais jamais aussi ubuesques que celle-là, dans un climat particulièrement délétère. Il est heureux que nous ayons avancé d’un même pas au sein de l’Union des Acteurs du Football en décidant de joindre nos voix à celles des présidents fidèles au syndicat Première Ligue, pour éviter, non pas à nous mais au football professionnel français, de tomber dans le piège tendu dont les retombées auraient été dramatiques pour l’évolution de notre sport. Nous ne pouvions restés spectateurs, il nous fallait agir pour préserver le seul intérêt qui vaille, l’intérêt du football professionnel français. C’est pourquoi, alors même que les familles devaient participer pour la première fois à l’AG de la LFP, ce que nous appelions de nos vœux depuis si longtemps et que nous avions obtenu en juin dernier, il n’était pas pensable que l’élection du Conseil d’administration puisse avoir lieu… Et puis, quitte à faire un peu vieux jeu, nous sommes pour le respect de la parole donnée, d’autant plus lorsqu’elle est confirmée par des engagements écrits. »

Journee166

Sylvain Kastendeuch : « Nous sommes pour un juste équilibre au sein du Conseil d’administration, pour une bonne représentation, qui donne l’image réelle de ce qu’est le football professionnel en France. Il n’est pas difficile de comprendre que l’action de quelques-uns était uniquement dictée par des intérêts personnels, pis par des querelles de personnes. L’unité affichée, après plus d’une année de brouilles et de discordes entre les dirigeants – auxquelles, il est bon de rappeler, que nous n’avons jamais voulu participer – n’était en réalité que de façade dans l’esprit de certains, peu ou prou enclins, de surcroît, à accepter que les familles aient droit de cité et leur mot à dire au sein du Conseil d’administration de la LFP, quitte à oublier que pour certains d’entre nous – joueurs et entraîneurs, Ndlr -, cela est écrit dans la loi. J’ai entendu de leur part, notamment dans la bouche du président de l’UCPF, des propos outranciers, des mots d’une rare violence, prononcés sous l’empire d’une haine féroce des syndicats, qui s’est accrue devant notre calme, la constance de nos idées, notre volonté de leur résister ou de ne pas nous laisser entraîner sur le terrain des insultes, malgré de multiples provocations. Ils n’avaient pas de prise sur nous, l’UAF, nous qui restions unis et persuadés que nous étions dans le vrai. Puis vint l’heure des déclarations de guerre, directes, personnalisées, tellement déplacées, mais qui en disaient long sur ceux qui, à bout d’arguments ou plutôt parce qu’ils n’en avaient pas, ont osé les prononcer ! »

« C’est ce que vous avez expliqué aux joueurs samedi dernier ? »

Philippe Piat : « Exactement, et ils nous ont non seulement confortés dans nos choix et nos décisions, mais ils nous ont donné mandat de maintenir notre position. Ils ont parfaitement compris que nous n’avions pas d’autre solution, ils ont parfaitement compris les enjeux, pris conscience que l’heure est grave. Ils savent également, comme l’UAF l’a fait savoir le jour même, que nous appelons à la reprise d’un dialogue constructif entre les dirigeants, et que nous sommes prêts à jouer un rôle si d’aventure on fait appel à nous. Pour sortir de l’ornière, il ne faut exclure personne, mais appeler au contraire tout le monde autour de la table. Il faut croire que le bon sens finira par l’emporter. »

    AG

Sylvain Kastendeuch : « C’est ce qu’il faut espérer car, au-delà, il faut bien comprendre – et les joueurs l’ont appréhendé – que le dialogue social est à l’arrêt depuis plus d’un an et demi maintenant. Les dirigeants, occupés à leurs problèmes, qui ont débouché sur l’explosion de l’UCPF et la création de deux syndicats de présidents, l’ont laissé de côté, malgré nos demandes répétées. Il est temps, là encore, de revenir autour de la table des négociations pour avancer. Les joueurs – les plus jeunes d’entre eux, notamment, dont il faut revoir les conditions – ne peuvent pas être plus longtemps les victimes collatérales de la guerre entre les dirigeants. C’est une raison de plus pour expliquer la mobilisation des joueurs et le soutien, inconditionnel, qu’ils apportent à notre action, tels qu’ils nous l’ont témoignés lors de notre Assemblée générale. »

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