Faruk Hadzibegic: « Qui critique l’UNFP FC a tort! »

Posté le 19.12.2016 à 14h23

En poste à Valenciennes depuis janvier 2016, Faruk Hadzibegic (59 ans), riche d’une carrière forte de vingt années passées sur les bancs de touche, a retrouvé, dans un club familial et passionné, un projet qui lui va comme un gant. Alors sans contrat depuis une expérience difficile à Arles-Avignon lors de la saison 2010-2011, il était venu encadrer, en juillet 2014, une session de l’UNFP FC pour les joueurs sans contrat. Une mission dans laquelle il s’était pleinement investi, et qui l’avait profondément marqué.

Ajaccio Hadzibegic 1 OK

« Durant l’été 2014, tu étais venu encadrer une de nos sessions organisées pour les joueurs sans contrat.  C’était aussi une période compliquée pour toi…

C’était professionnellement la pire période que j’ai connue, la pire période. L’UNFP m’a tendu la main et j’ai accepté d’encadrer le groupe avec beaucoup de plaisir et de cœur. Dans le football, on est parfois trop dans son confort quand on est en poste, aussi bien pour les joueurs que pour les entraîneurs d’ailleurs. On n’apprécie pas à sa juste valeur la fonction et la chance qui sont les nôtres, parce qu’on se sent intouchable. L’UNFP m’a permis de retrouver le terrain, le plaisir d’encadrer une équipe, d’être au milieu des joueurs dans un vestiaire, de les voir travailler, progresser.

Comme dans un club professionnel…

Exactement de la même façon, oui, d’autant que les conditions sont excellentes, qu’il y a des matches aussi. J’ai fait mon job au maximum, j’ai énormément appris humainement. Il a fallu m’adapter à chaque seconde, et c’est l’essence même de ce stage et de notre métier. L’effectif évoluait régulièrement, des joueurs partaient faire des essais, signer des contrats, d’autres les remplaçaient, car n’oublions pas que les joueurs viennent avant tout pour retrouver un club.

Cette expérience a-t-elle changé ta manière d’entraîner, de penser autrement ton métier ?

Sans aucun doute… Cette expérience m’a fait évoluer. Parce que les joueurs présents au stage sont d’une certaine manière en difficulté. Et si on ne comprend pas cette situation, si l’on ne s’adapte pas, quel que soit le joueur, quel que soit son niveau, il est alors impossible de l’aider. J’ai toujours été un professionnel exigeant, mais ce n’était pas le moment, ni la situation de l’être trop. J’ai passé mon temps à réfléchir à la manière d’aider et de toucher de mon mieux humainement les joueurs. Ce n’était pas toujours facile, mais on a créé de fortes relations avec Bernard (Mendy), Christian (Kinkela), ou encore Julien (Toudic), par exemple. J’ai compris ce qu’il fallait faire avec eux. Je devais les rassurer et les pousser à se dépasser, à rebondir.

 « Echanger, dialoguer, partager… »

Aujourd’hui, tu as retrouvé un club, te voilà à Valenciennes depuis un an maintenant…

C’est un club extraordinaire ! Et si je peux signer ici jusqu’à ma retraite, que l’on me donne un stylo tout de suite ! Mon effectif  est exceptionnel. Il y a un mélange ici, l’expérience et la jeunesse, qui cohabitent parfaitement bien. Le groupe apprend sans cesse, s’améliore tous les jours et sa marge de progression est importante. Je ne pouvais pas rêver mieux. C’est un club que je ne connaissais pas bien et j’en suis tombé sous le charme. Les supporters ont leur ville dans la peau. Ce ne sont pas des supporters de leur club, mais des supporters de leur ville, de Valenciennes. Et c’est une motivation supplémentaire pour nous au quotidien.

Gazélec Hadzibegic 1

Tu as eu souvent été catalogué comme un entraîneur destiné à mener des missions de sauvetage …

C’est une partie des difficultés qu’un entraîneur peut rencontrer. On me connaît surtout par rapport aux missions difficiles que j’ai acceptées, et je le prends comme un compliment. Cela signifie que je trouve les solutions face à des situations compliquées, que j’ai la capacité à gérer le stress, à faire progresser l’équipe, à installer un dialogue et à fédérer un groupe. Mais c’est dommage que ne retenir que cela. J’ai ramené au sein de l’élite Sochaux et le Bétis de Séville, et on ne m’en parle pas beaucoup, il est vrai.

Cela te gêne ?

Pas plus que cela. Je suis tellement content d’être sur les terrains, peu importe les circonstances. J’ai conscience d’être un peu catalogué, mais je ne me sens pas moins bon que les autres pour autant. On ne sait jamais, Manchester United va peut-être m’appeler à la place de José Mourinho (rires).

Pendant le stage,  tu venais échanger, partager en permanence avec ton staff. Est-ce tu travailles de la même manière à Valenciennes ?

C’est une question à poser à tous ceux qui travaillent avec moi. Je suis au centre d’entraînement tous les matins à 7h30, pour préparer la séance de 10 heures. Je passe saluer tout le monde ici, prendre le café et discuter. J’ai toujours été, j’ai toujours agi comme ça. Le football, c’est du dialogue, un combat de convictions. Ce ne sont pas des convictions que l’on doit imposer, mais auxquelles les gens doivent adhérer. Pour ça, on a besoin de dialoguer. Avec Sochaux, on est monté en L1 avec cette méthode. Tous les clubs que j’ai réussi à sauver, c’était pareil. Même à Bastia, malgré les 29 points pris en une demi-saison, on n’a pas réussi à se sauver, on a continué à travailler dans l’échange et le dialogue.

Reims Hadzibegic 3

Tu es un passionné, le football, c’est ta vie. 20 ans de carrière sur le terrain et autant sur le banc comme entraîneur…

20 ans en tant que joueur pro, entraîneur depuis 1995, j’ai presque 600 matches sur le banc, ça commence à faire (rires). Je suis comblé et ravi de faire mon métier, de réaliser ma passion au quotidien, d’avoir autour de moi des gens passionnés. Pour autant, je suis très calme et lucide. Je connais les risques du métier. Aujourd’hui, je suis ici numéro 1 et d’ici à une semaine je peux me retrouver numéro 7. C’est un risque que j’ai accepté et intégré dès le début de ma carrière sur le banc. Je parle avec beaucoup de monde, avec le staff, avec les joueurs, avec les journalistes, avec le président, mais à la fin celui qui compose l’équipe et qui assume ses responsabilités, c’est moi, parce que je suis le seul responsable.

« Une SIMPLE étape dans une vie professionnelle »

L’UNFP FC a encore, pour certains joueurs, une image négative, c’est le stage des chômeurs du foot. Toi, qui l’as vécu de l’intérieur, qu’est-ce que tu pourrais leur dire ?

Lors de mon passage, je ne me suis jamais senti inférieur ou chômeur, absolument pas. C’est simplement une étape comme dans n’importe quelle vie professionnelle. Tout est mis en place pour fonctionner comme un club pro. C’était avant tout un moment très fort, pendant lequel se sont créées de très fortes relations humaines. Ceux qui en parlent de manière négative ont tort et surtout ne l’ont jamais vécu de l’intérieur. Pour finir, je voudrais vraiment passer un message à toute l’équipe de l’UNFP qui travaille pour le stage : bravo à eux, ils réalisent un immense travail, dont trop peu de gens se rendent compte à l’extérieur, mais qui est exceptionnel de l’intérieur. Merci à eux ! »

Recueillis par Philippe Rossi
(Merci au club de Valenciennes pour les photos)

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