« Un autre homme et un autre joueur grâce à l’UNFP… », Romain Thomas

Posté le 02.03.2017 à 09h00

A 28 ans, Romain Thomas s’est imposé comme l’un des piliers de la défense du SCO Angers. Pourtant, son parcours n’a pas été un long fleuve tranquille. Il ne réussit pas dans son club formateur, le Stade Brestois, connaît le chômage à 22 ans et l’UNFP FC, se reconstruit à Carquefou en CFA, retrouve le monde professionnel au SCO Angers où il s’impose comme l’un des tous meilleurs défenseurs de la Ligue 1. Retour sur un parcours semé d’embûches…

« Romain, tu as connu le chômage dès la fin de ton premier contrat professionnel avec Brest où tu n’as pas réussi à percer, tu avais alors 22 ans. Comment as-tu vécu cette période ?

C’était assez compliqué pour moi. A Brest, où j’ai été formé, je n’ai pas réussi à m’imposer. Je n’ai joué que 5 matches en pro. Je n’étais sans doute pas prêt, pas assez aguerri pour le monde professionnel. Je me suis retrouvé au chômage à la fin de mon contrat. Je n’étais préparé pour vivre une telle situation. J’avais 22 ans, et je me disais que si j’avais signé un contrat pro, je ne devrais pas avoir de mal à en retrouver un. Je n’étais pas très lucide…

C’est en partie grâce à l’UNFP FC  que tu as pu te relancer ?

Je dois beaucoup à l’UNFP. Je n’en garde que des très bons souvenirs, même si au départ je n’étais pas très motivé pour y participer, parce que je ne connaissais pas le principe de ce stage et j’avais l’arrogance de croire que j’allais vite signer avec un club. Mes proches m’ont persuadé et ils ont eu raison. Je pense que ma carrière se serait arrêtée, tout simplement. Personne ne me connaissait.  Et puis, je ne me voyais pas faire une préparation physique tout seul. Au stage, toutes les conditions étaient réunies pour être opérationnel si on avait des essais à effectuer.

Romain Thomas avec l’UNFP FC en Juillet 2010

Tu t’es profondément remis en question au stage ?

Je suis arrivé complètement hors de forme. Je pesais 93 kg. Je me suis recentré sur moi-même et je me suis posé les bonnes questions. Je n’avais sans doute pas fait ce qu’il fallait pour percer au haut niveau, c’est certain. Pas seulement au niveau de la nutrition. Grâce à l’exigence du staff, j’ai pris conscience de ce que je devais faire au quotidien : la récupération, l’hydratation, le travail foncier, la préparation mentale des matches etc.

Et tout a changé…

J’ai repris confiance en moi grâce à mes performances lors des matches amicaux. Le coach Thierry Laurey (aujourd’hui à Strasbourg, Ndlr) a joué un rôle très important. Il me rassurait, me poussait à me dépasser et j’ai compris puis mesuré l’investissement personnel que j’avais à réaliser si je voulais réussir dans le monde professionnel. Un mois après la fin du stage et ma signature à Carquefou,  j’avais perdu 10 kg, j’étais un autre homme et un autre joueur.

As-tu ressenti cette image un peu négative du stage des chômeurs que l’on colle régulièrement à l’UNFP FC ?

Non pas du tout, j’avais vraiment l’impression de faire partie  d’un club. L’organisation est celle d’un club professionnel, avec des entraîneurs de haut niveau, un staff médical à notre disposition, un préparateur physique, des installations de qualité. Je doutais par moment dans la chambre d’hôtel. Je me demandais si j’allais recevoir des appels, ou si mes performances avaient été assez bonnes pour trouver un nouveau challenge. L’ambiance entre les joueurs était extraordinaire. On s’amusait beaucoup, mais on était hyper sérieux sur le terrain.

« Un plaisir fou à Carquefou »

Tu reçois finalement un appel de Denis Renaud alors entraineur de Carquefou en CFA et tu te reconstruis au niveau amateur…

C’est certainement lui qui a été à la base de mon renouveau. Jusque-là, je n’avais pas fait grand-chose, pour ne pas dire rien. J’ai foncé tête baissée dans cette aventure. De toutes les façons, je n’avais pas trente-six solutions. Le club était en CFA, mais il était assez structuré. Le coach passait ses diplômes, on sentait qu’il avait de grandes qualités pour ce métier. On s’entraînait à des horaires pas faciles, certaines fois en fin de journée, mais je prenais un plaisir fou. Le coach m’a laissé m’épanouir, j’ai pu enchaîner les matches. On est monté en National en 2012. On a fait une saison extraordinaire avec des joueurs comme Loïc Guillon, passé aussi par l’UNFP FC, des anciens nantais comme Nicolas Savinaud, Sébastien Le Paih ou Frédéric Da Rocha.

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Sous les couleurs de Carquefou (crédit photo Sud-Ouest)

J’imagine qu’ils ont été des modèles dont tu as pu t’inspirer…

Oui, complètement. Ils avaient une énorme humilité. Moi qui suis un passionné de foot, je les regardais avec yeux gros comme ça. Frédéric Da Rocha a joué plus de 500 matches en pro. J’ai vraiment progressé à leur côté. Ils me disaient de m’accrocher, que j’étais jeune, que j’avais encore le temps de rebondir. Moi, je voyais les années passer et je me disais à chaque début de saison que c’était la peut-être dernière qui débutait…

Ta carrière a finalement vraiment décollé avec ta signature à Angers en 2013…

J’ai vraiment remis les pieds dans le monde pro à Angers. Je suis arrivé avec la confiance engrangée à Carquefou et j’ai continué sur cette lancée. Je n’étais pas le premier choix parmi les défenseurs centraux. J’ai même fait le premier match de la saison pour dépanner en tant que latéral gauche. Le coach a eu une grande importance dans la suite de ma carrière. Un sportif a besoin de la confiance de son coach, et Stéphane Moulin, tout comme Denis Renaud, me l’ont bien rendue. Ce sont deux personnes qui ont compté dans ma progression.

Avec le SCO Angers

« Je me suis forgé un mental »

Aujourd’hui, tu côtoies le très haut niveau en Ligue 1. Avec le recul, aurais-tu imaginé avoir cette carrière ?

Sincèrement non. A l’époque du stage UNFP, je regardais des reportages de joueurs au chômage, qui avaient rebondi jusqu’en Ligue 1. Je voyais une montagne en face de moi. Je ne pensais pas un seul instant vivre cela, parce que j’en étais très loin. Revenir à l’étage inférieur au niveau amateur m’a permis de me forger un mental. Et puis, j’ai aussi quitté mon environnement familial. Jusqu’à l’âge de 20 ans, je vivais chez mes parents, je n’avais rien vu d’autre.

Ta réussite, tu la dois aussi à tes parents…

Ils y tiennent une grande part. Dès l’âge de 14 ans, ils se sont mis en quatre pour moi. Mon père a pris un temps partiel afin de pouvoir faire la navette entre Landernau et Brest. Mes parents ont fait en sorte que je puisse vive ma passion jusqu’au bout. J’ai été à deux doigts de me faire virer à 15-16 ans, parce que je n’étais surement pas assez bon à cet âge. Ils m’ont toujours soutenu. A la fin du contrat avec Brest, je ne savais pas si j’allais continuer le foot. J’avais même commencé un stage à l’usine à côté de chez moi, je ne voulais pas rester sans rien faire. Je trainais des pieds pour aller au stage UNFP. Il y a eu des prises de tête à la maison. Mes parents m’ont vraiment poussé à participer au stage. Je crois qu’ils ont eu raison d’insister…(rires)

Romain Thomas à Brest en 2007

Est-ce que tu penses déjà à l’après-football ?

J’y pense depuis l’époque de Carquefou. On s’entraînait le soir tard vers 18 heures, j’avais du temps libre et j’ai entamé des démarches avec l’UNFP, ESR et Pascal Bollini. J’ai commencé à passer mes diplômes d’entraîneur. Depuis que je suis à Angers, c’est plus difficile. Ici, je me forme sur le terrain, je vais voir les jeunes, je discute des séances d’entraînement avec Olivier Auriac, avec qui je jouais l’année dernière. Je suis un passionné, toujours dans la recherche, dans la progression. Je discute parfois avec le coach, Stéphane Moulin, pour apporter ma petite pierre à l’édifice, même si, entendons-nous bien, c’est lui le boss. J’ai vraiment déjà trouvé ma voie pour l’après-football. »

Pascal Bollini, « Un exemple ! »

Pascal Bollini est le directeur de l’UNFP FC. Il a côtoyé Romain Thomas à l’été 2010.

« Romain, c’est un exemple, puisqu’il a presque voulu arrêter sa carrière. Il a pris conscience de ce que le stage pouvait lui apporter. C’est un garçon ouvert, intelligent qui avait envie d’apprendre. ll a travaillé, il s’est remis en question et aujourd’hui, il est récompensé. Le stage est fait pour des garçons qui ont envie de rebondir. On les met dans les meilleures conditions possibles avec un staff professionnel, des installations de qualité. On fait attention à la nourriture, à la récupération. Je suis très heureux et fier du parcours de Romain. Je pense même qu’il a encore une marge de progression… »

Recueillis par Philippe Rossi

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