« On parle le même football… »

Posté le 15.07.2023 à 00h51

Réunis pour la bonne cause depuis le 26 juin dernier à la tête du staff technique de l’UNFP FC, Jérôme Arpinon et Anthar Yahia, au parcours diamétralement opposé, sont devenus aussi complices que complémentaires en un rien de temps. La cohésion, au sein de notre club éphémère, n’est pas seulement l’affaire des joueurs….

 

Mon premier a mis un terme à sa carrière en 2004. À 26 ans à peine. Les ligaments croisés dans le sac et le cœur pas si gros que cela car la vie lui a appris – si durement – à relativiser. Le football, même professionnel, ce n’est qu’un jeu après tout…

Mon second, au terme d’une aventure professionnelle aussi longue qu’une de ses siestes (on ne dit plus désormais « comme un jour sans pain »), a décidé, en 2016, que six pays et onze clubs différents, que deux CAN et une Coupe du monde – celle de 2010, la seule jouée en Afrique -, c’était bien suffisant.

Mon premier se rêvait entraîneur. Et il le deviendra.

Mon second s’imaginait manager. Et il le sera, Diplôme Universitaire de Gestion des Organisations Sportives (Dugos) et Diplôme Universitaire de manager général du CDES Limoges en poche. Limoges, comme Zizou. Et quelques autres…

Mon premier est nîmois. Tiens, comme Patrice Beaumelle, coach ici même il y a un an. Mais il a été formé à Arles, même s’il a pour toujours l’âme d’un Croco.

Mon second est né à Belfort. Et il a commencé à rugir à Sochaux, avant de finir sa formation à l’Inter Milan. Il porta le maillot de l’équipe de France, puis, nouvelle règlementation FIFA en vigueur dont il fut le premier à profiter au début de ce siècle, défendra les couleurs de l’Algérie. À 54 reprises.

 

Mon premier parle vite. Mais avec l’accent. Mon premier parle fort, parfois, mais c’est pour couvrir le bruit de cigales. Et se faire entendre.

Mon second parle doucement, sauf quand il parle vite et fort, « parce qu’il le faut parfois ! »

Mon premier était défenseur. Un vrai défenseur. Aïe.

Mon second était défenseur. Un vrai défenseur. Aïe aussi. Ahia – et pas Yahia ! – disaient les attaquants italiens. Autsch, les Allemands. Och, les Grecs. ‘uwtsh, les Tunisiens et les Saoudiens. N’est pas polyglotte qui veut !

 

Mon premier a entraîné en Corse. GFC Ajaccio.

Mon second y a joué (SC Bastia).

Mon premier est entraîneur de l’UNFP FC depuis le 26 juin 2023.

Mon second est son adjoint. Depuis la même date.

Mon premier, c’est Jérôme Arpinon.

Mon second, c’est Anthar Yahia.

Mon tout, c’est un duo aussi complice que complémentaire.

 

Émotions, plaisir, tolérance, humilité…

Jérôme et Anthar sont sur un bateau. Balloté par les flots lors des deux premières sorties face à Annecy et à Saint-Étienne. Deux rencontres, dix buts… Aïe, encore !

Quand tu as été défenseur et que tu es devenu entraîneur, c’est encore plus difficile à avaler, non ? Et quand tu parles de plaisir à tes joueurs, tout au long des entraînements ou lors de la traditionnelle discussion d’avant-match, chaque ballon pèse plus lourd dans tes filets.

Le foot, ça peut faire mal…

 

« C’est le sport le plus populaire, mais c’est surtout le sport qui me procure le plus d’émotions. »

« Émotion », « plaisir », les adversaires de l’ancien dur des surfaces le croiront-ils ? Mais Jérôme Arpinon n’oublie pas que le football, c’est aussi la stratégie, la compétition, la performance.

Et « le partage » renchérit Anthar Yahia, « la tolérance, l’école de l’humilité, aussi ».

« Anthar, c’est mon binôme, on parle le même football » et ils vivent, l’un et l’autre, la même passion, captivante, dévorante pour un sport qu’ils servent, l’un et l’autre, depuis si longtemps.

« Anthar s’était un peu égaré à la fin de sa carrière. C’est un entraîneur dans l’âme, ça se ressent. Il est bien, maintenant, là où il est… Notre boulot, c’est le management, la stratégie, la recherche de la performance. Il a toutes les qualités pour réussir… »

 

Faits pour se rencontrer…

Et l’ancien directeur sportif de l’US Orléans, sans regretter ses premiers choix, reconnaît d’ailleurs : « Le terrain m’appelait régulièrement. C’est un juste retour des choses… » Avant d’ajouter : « Je n’ai que 41 ans… »

Oui, Anthar, l’avenir t’appartient…

« L’entraîneur que j’aimerai devenir permettra aux joueurs d’exprimer toutes leurs qualités, il sera travailleur, juste, exigeant, passionné et bienveillant… »

Est-il étonnant qu’Anthar décrive ainsi Jérôme, cet « entraîneur de Ligue 1 qu’il a appris à connaître grâce à l’UNFP et à Pascal Bollini qui lui ont offert de vivre sa première expérience de coach» ?

Jérôme qui parle le même football, défend donc les mêmes valeurs. Celles que l’intervenant sportif qu’il a été alors qu’il était joueur a portées et partagées avec les détenus de la prison d’Arles. Celles sur lesquelles Anthar s’est appuyé pour mener quelques projets ambitieux, dépassant sa fonction au sein de l’US Orléans.

Et s’il se mettait à la place des joueurs, que penserait Jérôme de cet entraîneur qui ne conçoit pas le moindre exercice sans un ballon ? « Un coach stratège, travailleur, juste, qui fédère et qui est passionné par son métier. »

Passionnés, ils le sont, l’un et l’autre. Le premier à l’expérience déjà certaine, le second qui découvre une autre facette du football professionnel.

Finalement, ils étaient faits pour se rencontrer : « Pour le staff, c’est comme pour les joueurs. L’UNFP nous permet, m’a permis, conclut sans crier gare le Nîmois, de faire de belles rencontres tout en vivant une formidable aventure humaine… »

 

Avec Pascal Bollini qui les a réunis…

 

Mais même les plus belles aventures ont une fin. Ce samedi, à Hirson face à Valenciennes, Jérôme et Anthar vont s’asseoir pour la troisième et dernière fois sur le banc de l’UNPF FC. Ils s’étaient engagés pour trois semaines. Elles ont défilé si vite, comme ils ne manqueront certainement pas de le dire à Corentin Martins et à Jean-Jacques Pierre qui vont leur succéder.

Jérôme retournera à Nîmes. Forcément. Anthar à Orléans. Bien sûr. Avant, qui sait, de se retrouver pour un nouveau challenge. Maintenant qu’ils se connaissent.

Maintenant qu’ils savent qu’ils « parlent le même football ».

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