Avantage Lassana Diarra !

Posté le 30.04.2024 à 15h41

Même à considérer que les conclusions d’un avocat général n’obligent en rien la cour de justice européenne, souveraine – elle rendra ici sa décision dans quelques mois -, la lecture des 46 pages signées par Maciej Szpunar donne, pour reprendre au vocabulaire du tennis, un avantage à la FIFPRO, à la FIFPRO Europe et à l’UNFP dans leur dénonciation commune, à travers le cas de Lassana Diarra (1), du règlement du statut et du transfert des joueurs de la Fifa (RSTJ).

« En premier lieu, commente David Terrier, président de la FIFPRO Europe et vice-président du syndicat français, et contrairement à ce que la Fifa a maladroitement plaidé pendant l’audience en janvier dernier en s’attaquant à la légitimité de nos trois entités syndicales à mener cette action, il a affirmé que c’était bien là notre place, notre rôle et que ces actions en justice entraient totalement dans le cadre de nos fonctions.

« Devant notre volonté inaliénable de faire, au nom des joueurs que nous représentons, respecter le droit, la fédération internationale aurait tant aimé sur les nombreux sujets sensibles qui nous occupent parce qu’ils nous préoccupent – transfert, calendrier, contrat de travail, convention collective, protection sociale, Tribunal arbitral du sport, égalité des chances, pour ne citer que ceux-là – que notre légitimité soit remise en cause afin de dribbler les anciens footballeurs que nous sommes, transpercer notre défense et mettre hors-jeu nos avocats (2), sur cette affaire et sur toutes celles qu’il nous faudra mener pour répondre à la mission qui est la nôtre, aux demandes et aux attentes de nos adhérents. C’est raté ! »

 

L’une des nombreuses réunions préparatoires au siège de l’UNFP…

 

Et sur le fond de l’affaire, les trois syndicats ont apprécié la pertinence des commentaires de l’avocat général, tout en se refusant déjà à crier victoire : « Nous avons néanmoins bien noté, explique ainsi Philippe Piat, le président de l’UNFP, que monsieur Szpunar juge, je le cite, que ‘’les règles de la FIFA régissant les relations contractuelles entre les joueurs et les clubs peuvent s’avérer contraires aux règles européennes de concurrence et de libre circulation des personnes’’ et qu’elles ‘’sont contraires au droit de l’Union ».

« C’est cette entrave à la liberté de travail – en Europe, mais également dans le monde – que nous dénonçons depuis la mise en place, en 2001, du nouveau système des transferts de la Fifa, qui s’est toujours refusée à revoir sa copie alors même – et la fédération internationale ne peut l’ignorer – que nombreuses sont ses règles, à commencer par celles qui régissent les transferts, à venir en violation de la Charte européenne des droits fondamentaux.

« C’est désormais aux juges de la Cour européenne de se prononcer. Nous attendons leur verdict avec la confiance qui habite toujours ceux qui veulent, dans le football comme ailleurs, dans le football surtout où certains se pensent au-dessus des lois, que le droit des uns et des autres soit pleinement respecté. »

Et David Terrier de conclure : « Au-delà des conclusions de l’avocat général sur le système des transferts, il nous apparaît de plus en plus évident que seule une convention collective réellement paritaire est à même de pouvoir protéger les joueurs. S’il est illusoire de croire à un document européen, à des règles supranationales, il est dans l’intérêt général de faciliter en Europe la mise en place d’une convention collective dans chaque pays. C’est loin d’être le cas aujourd’hui. Il faudra certainement forcer la main, ici ou là, et pour finir peut-être rendre ce document obligatoire. Nous y travaillons, mais la route est encore longue. Dans certains pays, il n’y a pas de ligue professionnelle. Dans beaucoup de contrées, en Europe, le dialogue social entre employés et employeurs n’est qu’une vue de l’esprit, comme d’ailleurs aujourd’hui en France… »

 

(1) Lassana Diarra avait signé avec le club russe du Lokomotiv Moscou pour voir un an plus tard ce contrat résilié par le club pour une prétendue violation « et rupture du contrat sans juste cause ».
Le Lokomotiv Moscou a saisi la chambre de résolution des litiges de la Fifa d’une demande d’indemnisation et l’international français a formé alors une demande reconventionnelle portant sur le paiement d’arriérés de salaires. Lassana Diarra a fait également valoir que la recherche d’un nouveau club s’est avérée difficile parce que, en vertu du RSTJ, tout nouveau club serait responsable solidairement et conjointement avec lui du paiement d’une éventuelle indemnité due au Lokomotiv Moscou.
Alors qu’un accord potentiel avec le club belge Sporting du Pays de Charleroi a échoué en raison des conditions du RSTJ, Lassana Diarra a assigné la FIFA et l’Union royale belge des sociétés de football association (URBSFA) (l’organisme en charge du football belge) devant une juridiction belge pour obtenir des dommages et intérêts et réparation avant de porter, avec le soutien de la FIFPRO, de la FIFPRO Europe et de l’UNFP, l’affaire devant la Cour européenne de justice.

(2) Maîtres Jean-Louis Dupont, Martin Hissel, Peter Pape et Romuald Palao.

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