Eh dis Barkley, raconte…

Posté le 26.07.2022 à 22h27

Raconter l’histoire du monsieur story de l’UNFP Football Club, quelle drôle d’idée, non ? C’est pire encore que de jouer au golf avec des balles vertes. Il fallait donc être un peu maso pour en accepter l’idée, beaucoup pour décrocher le téléphone et appeler Barkley Miguel Panzo, prince de la swag attitude, en espérant néanmoins qu’il soit en train de filmer « l’inside » (en anglais dans le texte), en malmenant un 5D comme si c’était le sien, pour obtenir en loucedé des plans… originaux, pour « insta » et pour les d’jeuns comme on disait avant, en capturant, grâce à son œil – le bon ! -, les moments de vie d’un groupe dans lequel il s’est totalement fondu, peut-être bien d’ailleurs parce qu’il en était membre, il y a un an à peine.

Car Barkley a été footballeur professionnel. Ici et là. Enfin, dans tellement de clubs, en France et à l’étranger, qu’il surclasse Xavier Gravelaine lui-même, une référence en la matière pourtant, transféré à dix-huit reprises dans seize clubs différents en dix-sept années de professionnalisme.

Barkley, dont la carrière a été beaucoup plus courte, a fait mieux. Beaucoup mieux.

Nous éviterons néanmoins au lecteur – de rien, c’est normal… – la liste des équipes dont il a défendu les couleurs, tant elle s’étire comme un jour sans pain, même si le Franco-Angolais a tenu scrupuleusement à nous la réciter, tel un potache à qui l’on demanderait de citer tous les pays européens de sa connaissance, avant de défoncer notre WhatsApp avec les photos de tous les maillots qu’il a portés, soit plus de clichés encore que ceux réalisés par une troupe de touristes japonais en visite au château de Versailles…

De quoi filer le seum à n’importe quel être humain normalement constitué. Heureusement, une fois la partie… historique évacuée – c’était donc sa façon de dire bonjour, c’est toujours mieux que wesh, et de nous remercier pour l’intérêt que nous lui portions ! -, monsieur Miguel Panzo s’est mis à table…

 

En 2021, encore joueur…

 

Et d’abord, pourquoi Barkley ?

« Bah, oui, pourquoi… Papa ? »

Comme tous les jours, et à plusieurs reprises même, il était en conversation vidéo avec son père, qui vit en Angola, au moment où nous l’avons appelé. « Papa, on me demande pourquoi vous m’avez prénommé Barkley ? Tu ne me l’as jamais dit… »

Et l’on apprend de la bouche même du paternel qu’il avait alors un ami travaillant dans la… banque Barclays et que le nom de cette institution, créée en 1690, lui avait toujours beaucoup plu. Pas très rock n’ roll, vous en conviendrez…

« Mais c’est aussi parce que j’étais un grand fan à l’époque de Charles Wade Barkley, le basketteur américain, qui venait d’être sacré champion olympique à Barcelone, avec la Dream Team… »

Et si l’ailier fort était surnommé Sir Charles, le plus souvent, notre Barkley l’a échappé belle en pensant à l’un des autres sobriquets du MVP de la saison 1993 : Baby TGV…

Baby TGV Miguel Panzo, heureusement la passion du paternel avait des limites…

 

« Professionnel, c’est à l’étranger que je l’ai été ! »

Plutôt que d’aller jouer des coudes sous les panneaux, c’est vers le football que ce véritable titi parisien s’est tourné… Écoles de foot, détection, les qualités sont là, le gamin semble destiné à devenir pro. Et le voilà pourtant, encore mineur, qui part en république Tchèque, à Banik Most (oui, oui, ça existe !), après avoir promis toutefois de suivre ses cours via le Centre national d’enseignement à distance (Cned).

« J’avais promis, c’est vrai. » Et les promesses, comme l’aurait dit un certain Jacques Chirac, qui parlait en connaissance de cause « n’engagent que ceux qui y croient… »

« Disons que j’ai lâché l’affaire, je ne pensais qu’au foot », souffle-t-il, et l’on comprend alors qu’il le regrette.

Les années qui suivirent lui collèrent dans le dos l’image de l’éternel insatisfait, parce qu’il n’a souvent pas eu le temps de défaire ses valises qu’il reprenait déjà sa route. Besoin d’ailleurs ? Éloge de l’errance, comme chez Wenders, quand il faut partir pour se découvrir, savoir qui l’on est ou d’où l’on vient vraiment ? Pas seulement…

« Professionnel, c’est à l’étranger que je l’ai été. Pour moi, changer de club, de pays, de culture, cela n’a jamais été un problème, une contrainte. J’allais là où l’on voulait de moi. Je partais quand je ressentais que je n’étais plus à ma place. Voilà. Je suis riche aujourd’hui de toutes ses expériences, elles m’ont façonné, elles m’ont construit et je ne regrette rien, si ce n’est, peut-être, que j’aurai bien aimé être pro en France… Cela a bien failli se faire à deux ou trois reprises. Mais failli, seulement… »

C’est le football qui l’a jeté sur les routes. Parce qu’il avait décidé d’en faire son métier et peu lui importait, alors, d’être en Angleterre, en Slovénie, en Suède, en Autriche, à Sarlat ou à Saint-Brévin, aux Sables-D’Olonnes, à Orléans ou à Moulins. La roue tournait. Et il tournait avec elle.

« Je m’y suis fait. Plutôt, je me demande si je n’étais finalement pas fait pour cela. J’ai toujours donné le meilleur de moi-même, je n’ai jamais eu d’embrouille. Je suis un garçon respectueux, poli – Merci papa, Ndlr. C’est pourquoi je n’ai pas compris et j’ai mal vécu sur le moment que l’on puisse mettre mon intégrité en doute. Je ne suis ni un menteur, ni un tricheur.»

 

Wikipédia, Kardashian, QPR et Lituanie…

Et voilà qui nous ramène en février 2018, quand il n’a été un temps question que de Barkley Miguel Panzo sur les réseaux sociaux, plus cité que la Kardashian elle-même. On l’accuse alors d’avoir falsifié sa propre page Wikipédia et d’avoir réussi à tromper les dirigeants du FK Panevezys, club de deuxième division lituanienne, avec lequel il vient de s’engager…

Ces derniers, sur la foi des informations en ligne, auraient pensé qu’ils engageaient un attaquant de classe internationale, aux statistiques impressionnantes sous le maillot des Queens Park Rangers : 45 buts en 36 apparitions.

« Cette page était amendable par n’importe qui et je ne sais toujours pas si réellement quelqu’un s’est amusé à faire de moi un serial buteur ou si la traduction de l’anglais en slovène a brouillé les cartes. Mais la question n’est pas là : lorsque les réseaux ont commencé à s’enflammer, j’avais déjà signé mon contrat après un essai et deux matches amicaux à l’issue desquels le club a décidé de m’engager. Parce que j’avais prouvé ma valeur sur le terrain. Et pas sur le net. Certes, j’avais joué à QPR, mais dans les équipes de jeunes, jamais en pro et je mets quiconque au défi de prouver que j’ai pu faire croire du contraire… L’erreur que j’ai faite, c’est de sous-estimer la malveillance des gens qui parlaient de moi sans me connaître, juste pour exister sur la toile, et la puissance des réseaux sociaux. Les dirigeants lituaniens m’ont tout de suite soutenu et voulaient communiquer, d’autant plus qu’ils passaient pour des je-m’en-foutistes, capables de recruter un joueur sur les seules informations de sa propre page Wikipédia, alors qu’il y a tant de sites de statistiques référencés sur le football. Mais je leur ai dit que ce n’était pas la peine, que leur confiance me suffisait, que je continuerai à apporter les preuves de ma valeur sur le terrain. Aujourd’hui, croyez-moi, je n’agirai pas de même, il a fallu attendre pas mal de temps avant que de nombreux articles de presse ne viennent rétablir la vérité. Celle que j’ai toujours portée… Si j’ai un regret, c’est de n’avoir pas pu rendre par mes performances aux dirigeants du FK Panevezys la confiance dont ils m’avaient témoignée. Au bout de quelques temps, mon talon d’Achille a lâché… »

Et c’est reparti pour un tour. Lui dont l’agent fut un temps David Recorbet – entraîneur-adjoint de l’UNFP Football Club, ces trois dernières années – croise pendant sa rééducation une jeune kinésithérapeute, Alexia Bollini, qu’il retrouvera en 2021, alors qu’il débarque à Clairefontaine pour participer à feu le stage de l’UNFP :

« Pour moi, c’était la porte d’entrée idéale pour un éventuel retour en France, même si, évidemment, je n’écartais pas la possibilité de repartir à l’étranger. Je ne vais pas être original, mais j’ai été réellement impressionné par l’organisation, la qualité du staff, technique et médical, le soutien permanent que l’on apporte aux joueurs. Même si nous étions dans des conditions particulières en raison de la crise du Covid, c’était incroyable. Et je me sentais bien, à l’aise pendant les matches… »

 

Une reine et un mentor…

Mais c’est en dehors du terrain que s’est alors dessiné son avenir, sans qu’il y prenne garde véritablement.

Il avait alors déjà rencontré sa Zouz, sa petite reine.

« Queeny est journaliste. Et je me suis très vite intéressé à son travail, d’autant plus qu’elle exprimait le besoin d’être aidée, conseillée, soutenue… Sans nous en rendre compte, nous avons commencé à travailler comme un duo, car ce monde que je découvrais à travers elle, grâce à elle, m’a tout de suite passionné. Et j’ai foncé tête baissée, sans rien savoir au départ, mais en voulant apprendre… »

Et s’écrit alors une nouvelle histoire. Qu’elle soit belge, comme Queeny, n’a d’ailleurs aucune espèce d’importance…

« Nous sommes lancés dans un projet sans en mesurer totalement tous les contours. Mais c’est aussi comme cela que l’on avance, que l’on force le destin. Nous avions eu l’idée d’un programme en immersion dans la vie des sportifs et l’avons proposé à la RTBF. Et lorsque la radio-télévision belge de langue française nous a demandé de réaliser un pilote, une fois passés les moments d’exaltations, il a fallu se mettre au travail. Pour nous, c’était énorme et nous n’avions ni l’un ni l’autre idée de ce que cela pouvait représenter… J’ai alors contacté Cédric Doumbé, le kickboxer franco-camerounais, que je connaissais, et qui, heureusement, a accepté l’idée et s’est prêté au jeu, nous laissant entrer dans son quotidien, se confiant à nous… Mais une fois le tournage terminé, la confiance en nous a commencé à s’étioler… Car filmer, poser des questions, c’est une chose et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Avec le montage, nous plongions une fois encore dans l’inconnu. Mais de plus haut encore… »

Queeny en Belgique, Barkley à Clairefontaine et la RTBF qui attend…

 

Avec Philippe Rossi, son mentor, la complicité est évidente…

 

« Heureusement, il y a au sein du staff de l’UNFP Football Club un certain Philippe Rossi, monsieur vidéo et réseaux sociaux et tellement plus encore. Dès le départ, je m’étais rapproché de lui, lui posant toutes les questions qui me passaient par la tête et auxquelles il répondait, en prenant toujours le soin de m’expliquer les choses. Son discours très didactique m’a permis, jour après jour, de progresser et, si j’avais parfois le sentiment de trop lui en demander, il ne m’a jamais fait ressentir que je le dérangeais, alors qu’il croule littéralement sous le travail. Il prenait toujours le temps de me répondre, trop heureux de transmettre … Très vite alors, j’en suis venu à évoquer le montage que nous avions commencé. Et c’est grâce à lui, à ses conseils, à son investissement, que notre pilote a pris corps et vie. Si la RTBF l’a accepté et nous a commandé pour une année de reportages pour sa chaîne Tarmac, c’est grâce à lui. Je ne le remercierai jamais assez… »

Barkley commence à regarder différemment son métier de footballeur, alors qu’il quitte Clairefontaine.

« Surtout, compte tenu de ce que je venais de vivre, j’étais devenu exigeant. Je ne pouvais imaginer m’engager dans un club qui ne me proposerait pas, a minima, les même conditions de travail, les mêmes relations entre le staff et les joueurs, le même état d’esprit, les mêmes raisons de tout donner sur le terrain. Qui aurait pu m’offrir cela ? »

Et si le temps était venu de ranger les crampons dans l’armoire aux souvenirs et de ne les ressortir que pour s’amuser avec ses potes, car sa passion pour le jeu, elle, restera à jamais intacte…

 

Retrouver la famille…

 

Tout sourire au premier jour de l’UNFP Football Club…

 

« La décision s’est imposée à moi. Et je me suis lancé dans un nouveau projet de vie, avec Queeny, tout en sachant que ce ne serait pas facile, que nous allions devoir nous battre. Mais c’est une aventure passionnante, libératrice, qui nous construit l’un et l’autre, individuellement et en tant que couple. Aujourd’hui, en dehors de l’audiovisuel, nous avons notre propre label musical, nous sommes devenus les managers de quelques sportifs de haut-niveau, et, les réseaux sociaux contre lesquels j’avais tant pestés en 2018, m’offrent une source de revenus complémentaires puisque le nombre de personnes qui me suivent me donnent l’opportunité de faire ce que l’on appelle du placement de produit… Ça démarre bien, mais le plus difficile, dans ce genre de métier, ce n’est pas d’arriver, c’est de durer… »

Et c’est la raison pour laquelle, il y a quelques mois, Barkley a contacté Pascal Bollini, pour lui exprimer sa volonté de participer, en tant que membre du staff cette fois, à l’UNFP Football Club…

« Je pense que personne ne peut imaginer combien j’ai été heureux lorsque j’ai appris que l’UNFP m’offrait cette chance. Si, depuis l’année dernière, j’ai travaillé, j’ai progressé, il me reste encore beaucoup à apprendre dans le domaine de la photo, de la prise de vue, du montage. Je ne m’en suis pas caché : je suis venu pour apprendre et retrouver, en la personne de Philippe Rossi, mon mentor. En totale immersion, au milieu des joueurs, je nourris les réseaux sociaux de l’UNFP, je me perfectionne et n’oublie jamais d’écouter les conseils, d’être attentif aux critiques de Philippe car elles sont toujours fondées. Pour moi, c’est une expérience plus que positive. J’ai conscience de continuer à progresser, tout en travaillant en famille dans un milieu non seulement que je connais mais que j’affectionne… »

 

Barkley, lors du match face à Valenciennes…

 

Suffisamment pour nourrir quelques regrets ?

« Pas le moins du monde. J’ai tourné la page. Ici, je prends ma dose de football professionnel dans des conditions idéales, avec des gens fantastiques et, si cela me fait un bien fou, je sais que mon avenir est ailleurs désormais… Je n’ai pas arrêté sur un coup de tête, mais parce que je ne ressentais plus la même envie, le même besoin. Le foot, c’était devenu pour moi un travail comme un autre, je veux dire par là que la passion qui m’avait toujours animé s’en était allée… Et on ne fait rien de bien et de bon sans passion ! »

Ça ressemble à une conclusion, non ?

« Oui ». Il fallait bien qu’il ait le mot de la fin.