Robert Pirès : «Seuls maîtres à bord !»
Posté le 25.03.2025 à 16h57Le président Robert Pirès évoque par le menu le Comité de Solidarité de l’UNFP, officiellement lancé le lundi 24 mars, éclaire sur son fonctionnement et son financement, entend bien le faire connaître et reconnaître, rend hommage à son équipe, remercie le syndicat français pour sa confiance…

David Terrier et Robert Pirès, lundi, lors du lancement officiel du Comité de solidarité de l’UNFP…
« Vous avez assuré ne pas avoir réfléchi une seconde pour accepter la présidence du Comité de solidarité de l’UNFP que vous a proposée David Terrier, le président du syndicat français des footballeurs…
Et éventuellement, mon ami depuis trente ans ou plus. Ceux qui me connaissent savent que ce n’est pas le titre de président qui m’a poussé à m’engager, mais bien plus l’opportunité de vivre autrement, de servir différemment, à travers des actes concrets, forts, positifs, la passion pour le football qui continue de m’animer aujourd’hui encore… Et cela même si je retrouve à travers cet engagement de nombreux points communs avec ce qui a occupé tout ou presque de la première partie de ma vie…
Par exemple…
À commencer par une équipe. Et quelle équipe ! (1) Il n’y a rien de prétentieux à dire que chacun d’entre nous est régulièrement sollicité, au-delà parfois de nos propres engagements à travers une association créée, des actions ponctuelles ou encore des aides apportées sur un coup de cœur. Il nous faut faire des choix, qui tiennent à notre agenda, au projet en lui-même, à ceux qui le portent, au message.
Alors pourquoi le Comité de solidarité de l’UNFP ?
Tout simplement parce qu’à travers les trois axes définis, et tout en respectant le budget mis à notre disposition, à hauteur de 500 000 euros par an, et dont l’usage nous sera propre, nous aurons la liberté pleine et entière de décider, après en avoir discuté entre nous, sans la moindre intervention de l’UNFP. Il faudra, ce dont je ne doute pas une seule seconde, nous montrer dignes.
Vous serez donc seuls maîtres à bord ?
C’est exactement cela.
L’enveloppe dont vous dote l’UNFP, à entendre son président, peut augmenter en fonction des recettes du syndicat, notamment celles des droits télé…
Et David a eu bien raison de dire lundi que je suivrai ces évolutions de près et que je n’hésiterai pas à aller frapper à la porte du Comité directeur de l’UNFP pour qu’il revoie notre traitement à la hausse. Nous saurons remplir nos différentes missions avec ce que nous avons aujourd’hui, mais nous saurons faire bon usage aussi d’une dotation plus importante. Que personne n’en doute…
On entend souvent, et pas seulement s’agissant des sportifs, que ce genre d’engagement est une manière de redonner, ici au football, un peu de ce qu’il vous a apporté…
C’est fréquent, oui, je le dis moi-aussi. J’ai toujours pensé que l’on ne nous a rien donné, que nous sommes allés chercher par le travail, le courage, parfois dans la souffrance, ce que nous avons gagné, qu’il s’agisse des titres et des honneurs ou encore des contrats que nous avons signés. Je préfère reprendre à mon compte l’idée de transmission, chère à Olivier Dacourt. Nous passons le témoin, nous valorisons une certaine idée d’un monde du football moins individualiste, plus… solidaire évidemment, plus ouvert sur l’autre. Peut-être aussi donnons-nous l’exemple ? Mais alors, à regarder le parcours des membres du Comité, que ce soit d’ailleurs sur ou en dehors du terrain, il y a de longues années déjà que l’exemple est donné…
Vous évoquiez « trois axes définis »…
Le social, le sociétal, la formation…C’est le cœur de notre action.
Commençons par le social, si vous voulez bien…
Il s’agit ici de subvenir aux besoins de celles et de ceux qui sont dans le besoin, qui vivent une situation de grande précarité pour X raisons. Nous ne sommes pas dans le jugement, mais dans l’écoute, le soutien, l’aide. Nous pouvons également décider d’épauler les footballeuses et les footballeurs que des accidents de vie ont plongé dans un profond désarroi, qui sont démunis et appellent la famille au secours. Et la famille, c’est nous !
Le sociétal…
(Il coupe.) Pardon, pour être complet sur le social, lorsque Johann Culianez, membre de notre Comité, évoque cette petite seconde qui a fait du footballeur professionnel qu’il était un homme tétraplégique, on prend conscience, comme à chaque fois face à un tel drame, de la fragilité d’une vie. Mais lorsqu’on écoute Johan parlait de son combat, de sa volonté de ne jamais s’apitoyer, de refuser l’idée même de se résigner, de toujours regarder devant lui, on est frappé par la force de l’être humain, par son courage, par sa détermination. Il suffit d’un rien pour que la vie bascule, il suffit de peu de choses, finalement, d’un peu de soutien, de beaucoup de compréhension, pour lui redonner un sens. Face à ces accidents de la vie, notre Comité répondra présent, c’est une certitude, même si nous espérons tous ne jamais devoir y être confrontés… Cette fameuse petite seconde ne marque pas la fin, mais le début d’une autre vie, d’une nouvelle aventure aussi, comme celle qui, dans quelques mois, fera de Johann le premier tétraplégique au sommet du Mont Blanc. Incroyable !

Johann Culianez
Le second axe où il sera question du sociétal…
Comme je l’ai déjà dit, chacun des membres du Comité s’engage, à travers diverses associations ou actions, pour les autres, pour la société, sans pour autant avoir à le crier sur les toits. Nous savons donc de quoi nous parlons. Coopérer à la création d’une structure, d’une action, ou accompagner, via une dotation de matériels par exemple, une association soutenue par une joueuse ou un joueur, c’est un de nos engagements au sein de ce Comité. Compte tenu du grand nombre de footballeuses et de footballeurs qui s’engagent, mènent de nombreuses actions sociétales ou soutiennent celles existantes, nous savons qu’il nous faudra faire des choix. Nous les ferons et les assumerons tous ensemble !
Ce ne sera pas toujours facile…
Mais c’est peu cher payé devant la belle et forte aventure humaine que nous allons forcément vivre, nourris par tout ce que nous apporterons celles et ceux que nous rencontrerons parce que nous aurons su les écouter et nous saurons leur parler. Parfois simplement les regarder. Parce qu’ils auront pu partager leur enthousiasme et leurs doutes aussi, leurs rires et parfois leurs larmes, leur soulagement une fois les objectifs atteints. Puisque tous les atteindront !
La formation, enfin…
L’objectif du Comité est simple : permettre chaque année à quelques joueuses et/ou joueurs de se lancer ou de se replonger dans un projet d’éducation et de reconversion dont elles ou ils ne peuvent pas ou plus supporter le financement. Nous les aiderons à atteindre leurs objectifs pour une après carrière pleinement maîtrisée et réussie. Car il y a une vie après le football professionnel… Mais attention, il ne s’agira pas de couvrir l’intégralité des sommes nécessaires, mais de venir compléter les différentes aides au financement pour apporter le petit plus qui rendra accessible la formation souhaitée…
Comment allez-vous travailler ?
Nous n’avons pas défini d’agenda ferme et définitif, mais l’idée est d’organiser des rendez-vous de travail, des rencontres, des visios de manière récurrente, peut-être tous les 2-3 mois. Et plus si le besoin s’en fait ressentir. Et entre ces réunions, nous resterons en contact évidemment, nous échangerons régulièrement. Chacun travaillera aussi sur tel ou tel dossier avant de le partager avec l’ensemble du Comité, rencontrera des joueuses et des joueurs… On ne s’interdit rien.
Ces rencontres seront autant de dossiers à venir…
Il se peut, en effet, que les membres du Comité soient saisis directement. C’est pourquoi j’insiste sur la communication et la nécessité de promouvoir ce Comité auprès des joueuses et des joueurs. Mais je sais aussi qu’il n’est jamais évident d’évoquer devant d’autres les difficultés que l’on rencontre, les mauvaises passes que l’on traverse. J’ose espérer, puisque nous avons tous pratiqué le même métier, qu’Amandine, Griedge et Eugénie sont toujours en activité, que l’on se confiera plus facilement à nous. Je sais que c’est un des challenges à relever, mais j’ai confiance en cette équipe.
La proximité des salariés de l’UNFP avec les joueuses et les joueurs vous sera également utile en amont…
C’est une évidence. Le lien noué, la confiance des adhérents envers leur syndicat est un atout pour nous. Si l’UNFP a aidé une centaine de joueurs, ces dernières années, c’est bien parce qu’ils se sont confiés sans crainte à leurs représentants. Mais au-delà, nous profiterons aussi de l’expérience de l’UNFP en la matière car ce Comité s’inscrit dans la continuité des actions qu’elles mènent depuis sa création. Le fond ne change pas, seule la forme est différente. Ainsi, nous travaillerons en étroite collaboration avec la Direction générale du syndicat pour le volet social, avec l’équipe d’Europ Sports Reconversion pour toutes les questions liées à la formation, et avec Players For Society pour tout ce qui concerne l’engagement sociétal. Ils porteront à notre connaissance des dossiers qu’ils jugent à même d’être considérés par notre Comité, sans pour autant avoir la certitude que nous y donnerons une suite favorable. Mais nous avons besoin d’être ainsi nourris, même si c’est à nous – et à nous seuls, c’est toujours mieux de le répéter ! – qu’appartiendra la décision finale. »
(1) Amandine Henry, Eugénie Le Sommer, Griedge Mbock, Siga Tandia Johann Culianez, Olivier Dacourt, Bafétimbi Gomis, Prince Oniangué
